Fignon, 1984 : ce regard lointain
Ce regard lointain, c’est celui de Laurent Fignon.
Lointain, comme son esprit sur ce cliché. L’homme a l’air perdu dans ses pensées, complètement ailleurs. L’était-il vraiment ? Y a-t-il de la tristesse ou une quelconque mélancolie dans ces yeux ? Difficile à croire quand on sait que ce moment a été saisi en 1984, lors du Tour de France que le coureur français remportait alors pour la deuxième fois d’affilée.
Lointain, comme les 26 années qui nous séparent de cet instant où le photographe a légèrement pressé le bouton de son appareil. Tiens, 26 ans, comme mon âge. A 9 ou 10 ans, je jouais – ou plutôt j’essayais de jouer – pour la première fois au Trivial Pursuit. Le seul souvenir clair que j’en ai aujourd’hui, c’est cette question que l’on me posa : « Qui remporta le Tour de France en 1984 ? ». Je ne le savais pas. Même si l’année de ma naissance n’était pas si éloignée, j’étais trop jeune pour savoir. Mais je tentais une réponse en prononçant un nom, certainement le seul que je connaissais à l’époque : « Laurent Fignon ? ».
Je me souviens de la surprise et de la fierté que je ressentis alors : ma première bonne réponse au Trivial Pursuit !
Depuis, l’évocation de Laurent Fignon reste invariablement associée dans mon esprit à cette anecdote de mon enfance et à cette victoire dans le Tour de France de ma naissance. C’est un peu de ça qui est parti. Reste ce regard lointain du sportif face à une épreuve sportive et, rétrospectivement, celui de l’homme face à une épreuve de la vie.