“Je m’appelle Jules, j’ai 20 ans et je vais mourir” : Part. 2

Suite de “Je m’appelle Jules, j’ai 20 ans et je vais mourir”.

[Je sonne chez Laura. Elle semble radieuse, comme d'habitude. Ca ne va pas durer...]

Laura… . Oula, pourquoi tu m’appelles par mon prénom ? . Parce que le “ma chérie” n’est pas vraiment de circonstance. Ce n’est jamais facile à dire, mais je préfère que notre relation s’arrête… . Mais pourquoi ?! Qu’est ce que j’ai fait ?! . Rien, ce n’est pas du tout toi le problème. Tu es une fille géniale, mais je n’ai pas envie de m’engager plus avec toi, tu comprends ? . Heu, non. Ca te prend comme ça ? . Ca ne se contrôle pas. . Mais… tu peux pas me larguer comme ça. Tu me dois au moins des explications bordel ! . Bon écoute Laura, ça sert à rien de discuter. Ma décision est prise. . Mais Jules qu’est ce qui t’arrive ? Ca ne te ressemble pas d’être aussi sec… . Les choses changent, les gens également. Je n’ai rien contre toi, mais c’est ainsi. Ne sois pas malheureuse. Je dois y aller. . Mais Jules me laisse pas comme ça !

Bah si en fait. Cette rupture doit lui paraître brutale. Inattendue. Tout allait bien entre nous. Enfin je veux dire, on s’entendait bien sexuellement et on arrivait assez facilement à se mettre d’accord sur un film. L’essentiel dans une relation amoureuse. Tout le reste n’est que du superflu. J’aurais pu faire ma vie avec elle sans problème, mais vu qu’il me reste une seule année, j’ai envie d’en profiter au maximum. Je dois aussi rompre avec mes études d’Histoire. Enfin, il suffit que je ne me rende plus en cours j’imagine, l’université comprendra d’elle-même. Elle n’est pas si idiote.

Je repense à la réflexion de Laura : “Ca ne te ressemble pas”. Elle a raison, pour une fois. D’ordinaire je suis un garçon posé, calme, réfléchi. Jamais un mot plus haut que l’autre, toujours dans la retenue. Je vivais avec un frein, n’osant pas être moi-même. Mais qui dans cette société est vraiment lui-même ? Toi qui me lis ? Sincèrement, tu mènes ta vie exactement comment tu l’entends ? Non, je n’y crois pas. Peu de gens osent le faire. Une personne qui fait vraiment ce dont elle a envie, on appelle ça un fou. On se cache tous derrière une façade, un masque, des codes, une routine… La peur de l’autre et de l’image que l’on reflète nous paralyse. Comme la crainte du lendemain. Je sais que je vais mourir, je n’ai plus à m’en soucier. Je n’ai plus à construire ma vie, afin de m’assurer un avenir stable, je peux désormais profiter pleinement de chaque instant, sans me soucier des conséquences. Quelle liberté, quel pied ! Il y a quelques heures encore, j’étais exactement comme toi. Comment apprécier le présent en étant coincé entre nostalgie et peur du futur ?

Installé au fond du bus qui me ramène à la maison, je regarde les autres passagers. Ils n’ont pas l’air heureux. Faites l’expérience vous-même dans les transports en commun ou dans la rue. Les gens n’ont pas l’air bien. Peu de sourires, sauf ces sourires de circonstance, polis, hypocrites, mais dépourvus de sincérité. Personne n’ose se regarder. Exceptés les hommes qui mattent tous les mêmes jolies filles du coin de l’oeil. Il ne s’agit pas là de bienveillance, mais simplement d’envie. Le bus peut passer dans les plus beaux quartiers de la ville, personne n’admire le paysage par la vitre. Sauf 2-3 nouveaux. Ca leur passera. Les autres écoutent de la musique. Ils se sont coupés du monde. Seul moyen pour y survivre.

Ce matin encore en me rendant chez le médecin, j’avais exactement la même attitude. Mais maintenant, je veux m’ouvrir. Parler avec tous ces gens. Je tente ma chance avec mon voisin. “. Quel sale temps encore… Originalité zéro, banalité absolue. Tout va bien

 
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